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L’après France 1998

L’après France 1998

Le monde est peuplé de râleurs et d’éternels insatisfaits, cela ne fait plus aucun doute. Alors que l’heure est aux cris, aux explosions de joie (un lendemain de 14 juillet, cela ne s’invente pas), aux sauts dégénérés, aux actes incontrôlés, aux accolades, aux baisers, avec le front bleu blanc rouge, les peaux moites et les papillons dans le ventre, une poignée de rabats joie tente de gâcher la fête.

Il y a eu les Belges d’abord, dans ce que l’on appellera un excès de chauvinisme et de mauvaise foi. Malheureux sont les perdants, mais on ne pourra pas leur en vouloir. Il y a eu aussi, dans un registre beaucoup plus grave et impardonnable, les déclarations racistes des Italiens ou des supporters et joueurs d’Europe de l’Est – ceux-là devront être punis pour leurs dires. Il y a eu aussi ceux qui venaient mettre leur grain de sel virtuel sur des murs et des feeds emplis de ferveur, comme pour culpabiliser les heureux supporters d’être heureux, d’être fiers, et de le montrer en descendant dans les rues – parce qu’ils auraient mieux fait d’y aller pour des causes “plus nobles”, diront-ils. Mais quel formidable amalgame que ces sempiternels sermons ! C’est bien connu : on ne peut pas être supporter de foot ET militant pour l’environnement, on ne peut pas s’intéresser à la fois au ballon rond ET aux problèmes politiques du pays.

En 1998, les journaux parlaient d’une France “black blanc beur” représentée par Desailly, Deschamps et Zizou, et où, finalement, il n’était plus question d’origine ou de couleur de peau mais de fierté de mouiller le maillot de sa nation. En 1998, les femmes s’intéressaient au foot et on le disait sans avoir peur de trouver cela sexiste.

En 2018, les réseaux sociaux et l’esprit de contradiction qu’ils engendrent malgré eux nous amènent à avoir toujours quelque chose à contester, à diviser pour mieux régner. Alors que ces moments de liesse, bien que générés par un sport aussi populaire que peut l’être le football, sont précieux. Précieux parce qu’à cet instant, au coup de sifflet final et dans les heures (jours) qui suivent, il n’y a plus de jugement, plus de tristesse, plus de peur, plus de haine de l’autre. Il y a simplement des cœurs qui battent à l’unisson. Et c’est pour cette raison, dans des rues encore marquées de sang, dans des cafés ou des bars parisiens qui portent encore le brassard noir de jours meurtris, qu’il faut chérir ces instants précieux de sourires, d’éclats de rire, de liesse.

Pour tout cela, Kylian, Paul, Hugo, N’Golo, Olivier, Samuel, Antoine, et les autres. Pour tout cela, les rageux vous diront un jour aussi : merci.

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