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Ewan Pearson, la rigueur à l’anglaise

Ewan Pearson, la rigueur à l’anglaise

Pour sa première à Marsatac en 2014, le DJ et producteur britannique Ewan Pearson a surpris son public avec un set complètement différent de ce à quoi il nous a habitués, dans la chaleur de la scène RBMA, coincée entre les couloirs de la Friche. Il faut dire que j’étais tombée littéralement amoureuse de son travail après avoir écouté son podcast de plus 3 heures “Pulse 124” enregistré au Panorama Bar. Quelques heures avant son set, c’est devant un verre de vin blanc qu’il se confie, avec son sourire faussement réservé qui cache en réalité un grand bavard. Adorable, Ewan fait la bise spontanément, parle de sa fille, née il y a quelques mois, du concert de Kate Bush, vue la veille, et de musique, évidemment. Avec l’œil vif d’un vrai passionné et cette prestance très british. Confidences.

Ewan-Pearson

Quand es-tu arrivé à Marseille ?
Je viens juste d’arriver, car j’étais au concert de Kate Bush hier soir, à l’Eventim Apollo de Londres. C’était fantastique. Un concert génial, car c’est une scène moyenne, c’est un lieu ni immense ni trop petit, de taille idéale. Assez grand et suffisamment intimiste en même temps.

Es-tu déjà venu à Marseille ?
C’est ma première à Marsatac, mais pas ma première à Marseille. Il y a quelques années, j’ai joué pour Mix en Bouche, c’était super !

Comment te sens-tu quelques heures avant de passer derrière les platines pour Marsatac ?
Je suis très impatient de jouer ici. Je n’ai pas joué depuis plusieurs semaines, j’ai pouponné car je suis papa depuis 5 mois d’une petite fille. Mon dernier set remonte à deux mois environ, au Festival Number Six avec Andrew Weatherall. Donc je suis très excité à l’idée de jouer enfin ! Ensuite, je retourne à la maison.

As-tu un rituel avant de monter sur scène ?
Je ne suis pas superstitieux ni stressé. J’essaie juste de m’organiser et de réunir mes affaires, tout ce dont j’ai besoin pour mixer, mon casque, mes CDs. Une heure avant de monter sur scène, je suis généralement fatigué et j’ai besoin de calme, de me poser pour réfléchir, écouter quelques trucs, préparer ce que je vais faire. Mais ceci dit, je ne sais jamais complètement ce que je vais jouer. Je prépare rarement mon set complètement à l’avance, je préfère découvrir les choses sur le vif. J’aime me surprendre un petit peu.

« La musique a un immense pouvoir.
Elle souligne certains moments de la vie.
C’est terrifiant parfois. »

Et ton rituel en sortant de scène ?
En ce moment, je file au lit ! (rires) Je n’ai jamais été un grand fêtard. J’ai 42 ans donc j’imagine que j’ai besoin de plus de sommeil.

Y’a t-il d’autres artistes que tu as envie de voir ce soir à Marsatac ?
Justement avec Marcus (Shit Robot), on se disait qu’on adorerait voir Kenny Larkin, on aime vraiment bien le label R&S Records. Quand j’ai commencé à écouter de la techno de Detroit, je me suis intéressé à lui et à Carl Craig. J’ai vraiment adoré ses albums, en particulier Azimuth, avec un son très cristallin, très beau. Je ne l’ai jamais rencontré mais, pour être honnête, je vais vraiment avoir besoin de dormir après mon set. Ma femme va bientôt reprendre le travail, donc j’ai besoin de me reposer pour travailler en studio avant de devoir m’occuper de ma fille dans quelques mois. Je travaille sur deux albums jusqu’à Noël, pour deux artistes différents. Le premier est un groupe londonien, et le second est une collaboration avec le Dj et producteur Midland qui a un nouveau projet avec beaucoup de voix. Je m’occupe de la production et du mixage de l’album. Une fois toutes ces choses terminées, je serai un papa à temps plein pour un petit bout de temps !

La première chanson qui t’a marqué ?
Ma mère m’a parlé de quelques disques qui me faisaient bouger quand j’étais tout petit. Mon père joue de la guitare et il écoutait beaucoup de choses différentes. J’aimais beaucoup Rory Gallagher, un guitariste irlandais, enfin c’est ce que ma mère m’a dit en tout cas. Une des artistes dont je me souviens par contre, c’est la chanteuse américaine Bonnie Raitt dans les années 70. Je devais avoir 4 ans à peine et j’adorais son album. Ma mère m’a donné une cassette avec des chansons d’elle de l’époque et quand j’ai écouté ses chansons, j’ai eu l’impression de les avoir toujours connues. Une vraie madeleine de Proust. C’est un sentiment très fort et très étrange à la fois, car je ne l’associe pas à un souvenir en particulier. J’ai eu la même impression hier soir, en voyant Kate Bush à Londres. Elle a commencé le concert avec des chansons connues et le deuxième morceau qu’elle a joué, Hounds of Love, m’a laissé bouche bée. J’avais le vinyle lorsque j’étais plus jeune, quand j’avais 12 ans, et je l’adorais. Quand je l’ai entendu hier, mon cœur s’est vraiment emballé ! (rires) La musique a un tel pouvoir, un peu comme un parfum, qui produit une émotion très forte. Elle souligne certains moments de la vie, elle peut nous transporter dans le passé, nous évoquer des souvenirs. C’est un effet tellement fort qu’il peut même être effrayant parfois.

Quel artiste ou album t’a donné envie de le faire de la musique ?
Quand j’étais plus jeune, j’écoutais des tas d’artistes, comme New Order, les Pet Shop Boys et d’autres encore. Mais en tant que producteur, le premier album que j’ai vraiment aimé pour son côté technique, c’est celui de The Power Station, le projet de Robert Palmer, Duran Duran et le batteur de Chic, Tony Thompson. Leur son était légèrement disco. J’ai acheté leur album car j’étais obsédé par leur son et leur manière de le produire. Pas seulement car j’aimais leurs morceaux, mais parce que je voulais comprendre comment ils s’y prenaient. C’est ce disque, je pense, qui a déclenché mon envie d’être producteur.

Ta pochette d’album préférée ?
Celle du deuxième album des Pet Shop Boys, Actually, sur laquelle ils portent des vestes noires et des nœuds papillons, et où Chris Lowe est en train de bailler. Cette photo sur fond blanc est vraiment très réussie.
Sinon je suis vraiment fan de celles des albums de Factory Records, de New Order ou de celles réalisées par Peter Saville. Pour moi, c’est ça qui est beau avec le vinyle. On a dans ses mains un objet réel. Je me rappelle avoir été chez le disquaire pour savoir à quoi tel ou tel album allait ressembler. Il suffisait de regarder le mur de vinyles, et sans qu’on me dise quoi que ce soit, j’arrivais immédiatement à identifier ceux qui étaient de New Order. Parmi mes pochettes préférées, celle de True Faith avec la feuille jaune sur fond bleu.
Plus récemment, j’ai beaucoup apprécié celle de FKA Twigs avec cette photo incroyable, vraiment étonnante. J’ai acheté le vinyle car je trouve cette pochette stupéfiante.

Pet Shop boys - Actuallynew order true faithFKA Twigs album

Aimes-tu la musique de FKA Twigs ?
Je connais David Wrench, qui a mixé l’album, et je dois dire que je suis davantage admiratif, pas forcément amateur du son. C’est une musique assez froide. Mais ce disque est assez intéressant, je trouve.

Ta dernière déception musicale ?
Je ne vais pas forcément parler de déception, mais ma relation avec la musique a changé. J’ai l’impression que plus je vieillis, plus je me penche sur son côté technique. Je cherche à savoir si le disque est bien produit, et ma déception se situe plus de ce côté-là, lorsque j’écoute quelque chose que j’ai produit. Je suis très souvent déçu par ce que je fais après coup, je suis exigeant avec mes propres productions. Mais je crois que ça m’aide aussi à évoluer, à avancer.  Je ne pense pas qu’on puisse apprécier sa propre musique de la même façon que celle des autres.

Ton dernier coup de cœur musical ?
Récemment, j’ai adoré l’album de Jungle, mais aussi celui de Caribou, comme beaucoup de gens d’ailleurs.


La chanson parfaite pour se réveiller ?
J’écoute beaucoup de choses très fort dans mon studio, comme Queens of the Stone Age ou Iggy Pop. Mais j’ai pas forcément besoin d’écouter de la musique tôt le matin, dès le réveil. Parfois, quand je suis en studio avec d’autres producteurs, on parle de morceaux, d’albums, et on s’échange mutuellement des coups de cœur. Par exemple, parmi les derniers, il y a eu l’album The Visitors d’Abba.

La vie serait moins belle sans…?
Désormais, ma fille ! Je suis complètement fou d’elle. Je viens de découvrir ce sentiment terrifiant qu’est celui d’être parent !

Plus d’infos :

➽ Ewan Pearson sur FacebookSoundcloud
➽  www.ewanpearson.com

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